Mes sports dans la télévision de ma vie

Dialogue ma télévision

Ce n’est pas un débat, mais vous serez sûrement d’accord avec moi sur le fait que  le sport à la télévision est quand même la meilleure invention humaine à égalité avec le jeu vidéo FIFA, non ? Si je n’avais pas eu la chance de naître à une époque avec cette activité à disposition… je n’aurais pas survécu. 

Une bien belle histoire sportive

Le Monologue du Gredin
Gilles N°10 Rapaport

En 1923, petit garçon de 10 ans, ce n’est pas le fait que Papa se soit cassé la gueule sur les  shrapnels allemands pour donner du plaisir à pas encore le Maréchal mais Pétain quand même dans les tranchées de 17, ou que la maman elle était partie avec la grippe espagnole en 19 et que Tonton ne soit jamais remonté du puit N° 5 après le coup de grisou de 21 qui m’aurait poussé à choisir le chemin définitif du petit ange parti trop tôt. Non. À tout ça, on peut facilement survivre. Par contre ne pas voir dans le poste la finale de la coupe de France entre le Red Star et le FC Sète en mai cette année-là, un affrontement des titans du ballon rond qui se solda par une victoire communiste 4 à 2 suite à un tir magnifique dans la lucarne de Marcel Naudin, cela a de quoi pousser un enfant sensible et fan de retransmission foutballesque à la dernière des extrémités (j’aime bien cette expression, ce serait quoi l’avant-dernière des extrémités, d’ailleurs ?).

Mais qu’est ce qui peut motiver un tel amour pour la chose sportive télévisuelle chez l’homme de composition franco-auvergnate-bobodude-panamesque je vous le demande ? Et je vais me répondre immédiatement qu’il faut chercher les origines dans les archives du siècle dernier, ce qui est encore et toujours une surprise totale pour les lecteurs assidus de ces chroniques que vous êtes et je vous en remercie.

Un exercice de psychanalyse avec short et bières

Avant que je ne me transforme en Monsieur Châtellier, j’ai été Gaël Le Jeune, sous les règnes successifs de Valéry de Chamalières et François de Jarnac, une version à peine duveteuse de moi-même dans ses années d’enfance puis d’adolescence nourries au sein fécond de la télévision française. Goulûment je me gavais gaiement de tout ce qui passait dans le poste et je crois pouvoir dire avec le recul qu’il n’y a pas de quoi s’en vanter. Feuilletons, films, émissions quelles qu’elles soient et bien sûr retransmissions de compétitions sportives, j’ai tout vu de cette époque bénie qui était quand même bien mieux que celle d’aujourd’hui à ce qu’on m’a dit.

Si les films et feuilletons ont modelé le personnage que je suis (ne joue-t-on pas tous un rôle dans cette pièce de théâtre qu’est la vie ?), le sport télévisé, avant l’arrivée des jeux vidéos de simulations sportives donc, a bercé le pratiquant dilettante et indécis que j’étais tout au long de ces années là. Touche-à-tout à peine moyen en matière d’activité physique mais en tout bien tout honneur – appréciez la finesse de cette saillie je pense être prêt pour le Théâtre des 2 Ânes – j’alimentais mes différentes passions sportives à grandes rasades de Final Four, Super Bowl, Coupe des coupes, Tournoi des 5 nations et Jeux olympiques. J’oserais dire – mais quelle perspicacité dans mon auto-analyse psychocastellienne* ! , je me demande combien je me dois pour cette séance ? – que c’était mon carburant indispensable pour la pratique de tel ou tel sport. Je les ai tous empilé. Tellement que j’ai parfois du mal à m’y retrouver quand je dois reprendre le short. Est-ce qu’on a besoin de crampons pour faire un beach-volley ? 

Cette chronique lu pour vous par Gauthier de la Touche, sociétaire de la Comédie de la Vie Française

Si les images de l’époque n’avaient pas toute la qualité technique des retransmissions actuelles, les commentaires eux avaient une puissance et une pertinence que l’on doit sans doute à l’héritage radiophonique et surtout à l’absence totale de barrière de ces gars-là grâce à l’absolu absence abyssale néantissime de nanas dans les parages des micros derrière lesquels tout pouvait se dire, et tout se disait. Les gars de l’époque n’avaient pas à s’embarrasser de brancher leur quant-à-soit : leur éducation restaient à la maison avec bobonne jusqu’à ce qu’ils rentrassent satisfaits du travail accompli à informer le bon peuple avide de ballons, balles et autres bobsleighs mettre leurs pieds chaussés de charentaises sous la table que leur régulière avait garni d’un boudin-purée qu’ils avaient bien mérité parce que « putain, commenter cette finale au Heysel, c’était une vraie chierie » ou que « les arbitres du plongeon/patin à glace/gymnastique avaient des noms imprononçables mais trop marrants » et « ces russkofs et ces chinetoques, ils sont vraiment pas comme nous, Simone repasse moi de la sauce au sang bordel ! ». 

Requiem pour un ponte
Gilles Malreaux Rapaport

Aujourd’hui, cet art de vivre est perdu pour ce qui concerne les commentaires sportifs qui sont plus policés, moins vivants voire glaciaux si vous me le permettez. Ce qui ne m’empêche pas de suivre toujours, dès qu’on m’en donne l’autorisation dans la République populaire laxisto-fasciste où je vis (connue précédemment sous le nom de Châtellerie), les matchs de la meilleure équipe du monde de Paname avec le Messi sur mon écran TV. J’ai une astuce pour retrouver l’ambiance de mon enfance dénuée de tout filtre : je coupe le son des commentaires et je mets à la place celui de l’Heure des rots sur  CNews. C’est ma madeleine au Viandox à moi sans passer par la case Combray.

* Mouvement psychanalytique conçu par Monsieur Châtellier et ne s’appliquant qu’à lui même.

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